Thierry Boutsen : « L’automobile est un virus »

Après 23 ans dans l’aviation privée, notre ancien vainqueur en F1 revient à ses premières amours. Ambassadeur de Gentleman Car (et donc de Shelby), il s’est également lancé dans le trading de voitures de collection.

Comment est né ce partenariat avec Gentleman Car et Shelby ?

« J’ai rencontré Philippe Médart, patron de Gentleman Car, lors d’un Salon il y a plusieurs années. Il faut savoir que je suis amoureux fou des Cobra, Shelby et autres GT40. On en a donc forcément parlé puisqu’il voulait développer la notoriété de son activité, à savoir l’importation et la distribution de Shelby en Europe. »

Ce sont des modèles qui te parlent ?

« Je suis passionné par ces voitures V8, simples, facile à conduire et à entretenir. Et qui ont une gueule extraordinaire. Les sensations que ma Cobra procure sont extraordinaires. Elle est parfaite pour les petites routes des environs de Monaco, où je réside. Virile à piloter, elle est conçue comme dans les années 60, sans aucune assistance de direction ou de freins. C’est aussi cela qui fait son charme. »

Ces voitures te rappellent des souvenirs de jeunesse ?

« Et comment ! La GT 40, ce sont bien entendu les 24 Heures du Mans. J’ai vécu ça étant gamin, et ce fut une révélation. Quant à la Cobra, c’est une voiture mythique qui est apparue dans de nombreux films. Lorsque de pilotais en Formule 1, nous étions allés faire des essais de pneus à Daytona et je me souviens très bien des Cobra qui y roulaient. Déjà à l’époque, je voulais en conduire une ! »

Après ta carrière de pilote, tu t’es investi à fond dans le commerce d’avions privés. Aujourd’hui, tu sembles revenir en force dans l’automobile…

« J’ai fait du sport auto pendant 23 ans, puis de l’aviation pendant 23 ans. Mais l’automobile est un virus, donc j’y reviens, oui. J’ai eu l’occasion de vendre une voiture (une Ferrari F1), puis une seconde et une troisième à un client qui m’est très fidèle. La sauce a commencé à reprendre. Je suis également remonté dans plusieurs Formule 1 de l’époque, mais aussi dans la Porsche 962 avec laquelle j’ai remporté plusieurs épreuves dans les années 80. Avec beaucoup de plaisir, d’autant que les performances étaient au rendez-vous. J’ai participé au Tour Auto également, en Porsche, une expérience exceptionnelle. J’ai aussi fait quelques tours en Lamborghini à Francorchamps, ou en BMW M6 GT3 au Castellet. Mais je ne referai plus jamais de compétition. J’ai passé l’âge de prouver que je sais freiner plus tard et accélérer plus tôt qu’un autre. »

Tes enfants sont également passionnés d’automobile ?

« Oui, Kevin est ingénieur de piste et professeur d’université à Miami, dans un département d’ingénierie mécanique. Et Cédric, mon autre fils, m’a rejoint ici à Monaco dans le département auto qui est en plein développement. Le business de l’aviation est très prenant, et seul je ne parvenais pas à développer la branche automobile tel que je l’aurais voulu. Je ne peux m’en occuper que 20% de mon temps, raison pour laquelle Cédric est avec moi. »

En quoi consiste ton activité automobile ?

« Nous sommes mandatés par des clients pour vendre leurs voitures. C’est du courtage, comme je le fais pour les avions. Les voitures ne sont pas stockées chez nous, mais bien chez les clients. Cela dit, cet été, nous allons ouvrir un show-room dans le port de Vintimille qui a été racheté par Monaco. »

S’agit-il de voitures de route ou de compétition ?

« A peu près moitié-moitié. Nous avons actuellement deux Porsche 962, dont une homologuée pour la route, une Lotus 1969 de Formule 2, une Osella et une Chevron. Pour la route, nous avons plusieurs Ferrari et Porsche, ainsi qu’une Bentley de 1935. La plus chère étant la Porsche 962 « route », qui vaut environ 2,5 millions de dollars. »

Et toi, au quotidien, tu roules avec quoi ?

« Une Renault Twizy pour me déplacer dans Monaco… et une Audi Q7 6 litres V12 (rires). Je pense qu’on n’est pas vraiment sur la bonne voie avec les voitures électriques. Leur fabrication pollue beaucoup, les batteries sont hautement toxiques et leur recyclage n’est pas optimal. Ensuite, on produit l’électricité avec du nucléaire ou des centrales au charbon. La seule différence avec l’électrique, c’est qu’on ne prend pas les gaz d’échappement dans la figure. Ce n’est donc pas, selon moi, une solution d’avenir. Je crois davantage dans l’hydrogène. »

Tu as encore un pied en Formule 1 ?

« Pas vraiment, même si j’ai gardé de bons contacts avec certains pilotes comme Gerhard Berger, David Coulthard, Keke et Nico Rosberg. J’aime encore la F1, avec ses batailles et ses rivalités, et je soutiens à fond Charles Leclerc, qui habitait à 50 mètres de mes bureaux. Mais cette compétition est devenue beaucoup trop réglementaire à mon goût. »

Propos recueillis par Stéphane Lémeret